• L'épisiotomie

    Alors que l'OMS parle de dérive culturelle quand le taux d'épisiotomies est supérieur à 20% , le taux d'épisiotomie en France s'élève à 60% environ et monte à plus de 70% pour les primipares.  Dans certaines maternités ce taux atteint 90% ! Il s'agit alors d'un acte de routine, pratiqué sans discernement et sans bénéfice médical prouvé.

     

    La plupart du temps, les praticiens vous laissent entendre qu'il vaut mieux pratiquer une épisiotomie afin de préserver votre périnée. L'épisiotomie permettrait de prévenir :

    - le risque d'une déchirure (couper pour éviter une déchirure : c'est assez paradoxal je trouve :  dans les 2 cas les muscles sont lésés et une suture est obligatoire... Si vous deviez "préserver" un habit, est ce que vous couperiez le tissu pour éviter qu'il  ne se déchire peut être - mais c'est pas sûr - spontanément ? )

    - une incontinence urinaire ou fécale

    - un prolapsus

    Par ailleurs, l'épisiotomie permettrait d'accélérer l'extraction foetale  : passage plus large donc plus facile ; possibilité d'utiliser des instruments (ventouses, forceps) pour faciliter l'expulsion. Elle serait garante d'une cicatrisation rapide etc.

     

    En réalité, les études scientifiques démontrent le contraire :

    - d'une part aucune étude scientifique n'a pu prouver le bénéfices de l'épisiotomie en ce qui concerne les 3 indications majeures (prévention des déchirures / incontinences / prolapsus)

    - d'autre part des études sérieuses ont montré que l'épisiotomie présente plus de risques que la déchirure spontanée

     

    « Comme toute intervention chirurgicale, l'épisiotomie présente certains risques : risque d'hémorragie importante, de formation d'hématome et d'infection. Il n'y a aucune preuve que l'épisiotomie de routine réduit le risque de traumatisme périnéal grave, améliore la guérison du périnée, empêche la souffrance foetale ou réduit le risque d'incontinence urinaire d'effort. »

    Henci Goer, Chapitre 14, Episiotomy. In Obstetrical Myths Versus Research Realities

     

    Définition

     

    L'épisiotomie est une incision du périnée pratiquée chez la femme enceinte : la peau, le tissu conjonctif et le muscle sont sectionnés. Il s'agit d'un acte chirurgical qui peut être pratiqué par les sages-femmes ou par les obstétriciens (si on prend en compte les accouchements non pathologiques uniquement, on observe par ailleurs que les sages-femmes pratiquent moins souvent cet acte que les médecins).

     

    On distingue épisiotomie médio-latéale (incision vers le bas et sur le côté droit : la plus largement pratiquée en Europe) et épisiotomie médiane (incision directement vers le rectum).

     

     

    Des bénéfices qu'on peut mettre en doute

     

    Les déchirures

    L'abandon de la pratique de l'épisiotomie prophylactique conduit naturellement à une augmentation des déchirures du premier et second degré. Certains concluent de ces éléments que l'épisiotomie préserve le périnée des risques de déchirures ... c'est oublier qu'une épisiotomie équivaut au minimum à une déchirure du 2nd degré et qu'elle augmente le risque de déchirures du 3è et 4è degré ! Plus grande qu'une déchirure spontanée, elle nécessite toujours une suture, entraîne des saignements beaucoup plus importants, et cicatrise moins bien.  Où se situe le bénéfice pour la femme enceinte ? Pourquoi pratiquer de façon systématique une épisiotomie alors qu'une déchirure reste hypothétique ? 

     

    Les femmes ayant subi des épisiotomies médianes ont 50 fois plus de risque de déchirure grave  et les femmes ayant subi des épisiotomies médio-latérales ont 8 fois plus de risque de déchirure grave que les femmes sans épisiotomie. La pratique de l'épisiotomie dans un accouchement par forceps double le risque de déchirures graves.

    2% des femmes ne subissant pas d'épisiotomie ont des déchirures du troisième ou quatrième degré, contre 15% en cas d'épisiotomie. 53% des femmes ne subissant pas d'épisiotomie ont un périnée intact.

    Selon l'AFAR :

    "les causes des déchirures périnéales que l'épisiotomie prétend éviter sont à rechercher dans les procédures obstétricales : position d'accouchement imposée, poussées dirigées, dopage au Syntocinon, etc. En parlant d'épisiotomie, on peut ainsi remonter toute une chaîne d'interventions abusives justifiées uniquement par la crainte du médico-légal. Une crainte qui se réduit, en France, à la peur de ne pas en faire assez."

     

    Les prolapsus

    En empêchant les muscles du plancher pelvien de subir un étirement important, l'épisiotomie préserverait des incontinences urinaires et du prolapsus de l'utérus : mais l'épisiotomie étant pratiquée juste avant l'expulsion, les muscles ont déjà été étirés ... Si on voulait réellement préserver le plancher pelvien, il faudrait pratiquer l'épisiotomie avant l'engagement du bébé dans le vagin.

     

    Les incontinences

    L'épisiotomie ne réduit pas le risque d'incontinence urinaire (environ 3% des femmes souffrent encore d'incontinence urinaire 1 an après l'accouchement) et augmente le risque d'incontinence anale. La durée du travail, une gestion active du travail et l'épisiotomie sont les 3 principaux facteurs conduisant à une incontinence anale. 6% des femmes ayant subi une épisiotomie souffrent d'incontinence anale  après l'accouchement.

     

     

    Des risques et des inconvénients réels

     

    Douleurs

    Ne vous étonnez si votre obstétricien vous recommande d'apporter une bouée dans votre valise de maternité : en cas d'épisiotomie, la station assise est très pénible les premiers jours. Mais la douleur post partum peut persister longtemps : points trop serrés, douleurs à la reprise des relations sexuelles avec votre conjoint.  Ainsi, de nombreuses femmes déclarent encore souffrir 2 à 3 semaines après l'accouchement.

     

    Dyspareunie

    80 % des femmes ayant subi une épisiotomie ont une reprise de rapports douloureux ; 41%  admettent que ces rapports sont toujours pénibles 3 mois après l'accouchement et 22% 6 mois après l'accouchement. Six mois après l'accouchement, 1/4 des primipares déclarent avoir des sensations sexuelles appauvries.

    NB : lors d'une épisiotomie, on prend aussi le risque de sectionner des nerfs reliés au clitoris : d'où une moindre sensibilité sexuelle.

     

    Problèmes de suture

    Il peut arriver que des points de suture "lâchent" : il est alors nécessaire de reprendre la cicatrice en pratiquant un nouvel acte de chirurgie parfois considéré comme "esthétique" et donc taxé et pris en charge par la sécurité sociale comme tel ... La suture peut aussi être trop serrée (l'entrée du vagin se trouve rétrécie, d'où un inconfort pendant les relations sexuelles notamment).

     

    Infections

    Dès 1983 Thacker et Bauta ont mis en évidence que les infections de la cicatrice et les abcès s'élèvent de 0,5% à 3%. A noter que certaines infections rares (nécrotisation faciitis et clostridial myonecrosis) peuvent directement entraîner la mort de la patiente (cf Goer). Plus l'incision est importante plus ces risques augmentent ...

     

    Risques d'hémorragies

    L'accouchement par voie basse entraîne une déperdition sanguine évaluée à 400 ml. On parle d'hémorragie de la délivrance quand les déperditions sanguines sont supérieures à 500 ml (mais ce diagnostic repose essentiellement sur l'évaluation visuelle et la pesée  - d'où une forte marge d'erreur : de 30 à 50% en moyenne). On convient habituellement que la césarienne induit une déperdition sanguine évaluée à 1l en moyenne. Contrairement à ce qu'on pourrait croire, les pertes sanguines en cas d'épisiotomie sont plus importantes que les pertes sanguines en cas de césarienne; elles sont encore accrues en cas d'extraction instrumentale. Plusieurs explications possibles :

    - les forceps conduisent souvent à des déchirures vaginales (d'où un risque accru d'hémorragie)

    - le temps écoulé entre l'accouchement et la suture de l'épisiotomie (une épisiotomie est plus difficile à suturer qu'une césarienne et on attend parfois la délivrance avant de suturer l'épisiotomie).

     

    Par ailleurs il apparaît que les déperditions sanguines en cas d'accouchement par voie basse avec épisiotomie sont souvent sous estimées : d'où une inadéquation entre la réaction de l'équipe médicale et l'importance de l'hémorragie (absence de mesures prises contre l'hémorragie ou bien mesures prises tardivement). Affolant quand on sait que la première cause de mortalité maternelle est précisément l'hémorragie post partum.

     

    Des conséquences différentes suivant le type d'épisiotomie

    - L'épisiotomie médiane est moins douloureuse, cicatrise mieux, et risque moins de causer une dyspareunie que l'épisiotomie médio-latérale. Elle cause aussi moins de pertes sanguines .... Elle est source reconnue de déchirures surajoutées du 3ème et 4ème degré, avec les effets secondaires afférents ; elle est aussi une cause avérée de troubles de la continence fécale. C'est le type d'épisiotomie le moins pratiqué en Europe.

    - L'épisiotomie médio-latérale est donc plus douloureuse, cicatrise moins bien, augmente la dyspareunie et provoque des pertes sanguines plus importantes.

     

    Autres risques de l'épisiotomie

    - Hématomes

    - Réaction inflammatoire et aggravation des hémorroïdes

    - Douleur lors de l'incision ou/et de la suture. Il est encore fréquent que des épisiotomies soient recousues sans anesthésie, ceci incluant les cas de péridurale qui ne fonctionnent pas ou partiellement (1 sur 100 environ)

    - Blessure psychologique ; sentiment de mutilation

     

     

    Pourquoi laisser se déchirer spontanément ?

     

    - Quand on coupe ... c'est coupé - définitivement. Ne pas couper, c'est laisser la possibilité soit que le périnée se déchire soit qu'il reste intact

    - Les déchirures provoquent moins de déperditions sanguines

    - Les déchirures sont souvent moins graves (déchirures du 1er et 2nd degré)

    - Les déchirures suivent les fibres naturelles : la cicatrisation est donc plus facile que quand les fibres sont coupées  (d'ailleurs certains chirurgiens "déchirent" l'utérus lors d'une césarienne plutôt que de la couper ayant observé que celui-ci se remettait mieux en cas de déchirure)

     

     

    Conduite à tenir en cas de déchirure

     

    En cas de déchirure spontanée, il n'est pas toujours nécessaire de suturer la plaie. La plupart des déchirures cicatrisent en effet rapidement sans points de sutures. Par ailleurs qui dit point de suture dit anesthésie locale, corps étranger (donc gênant la cicatrisation), séparation éventuelle mère enfant à un moment crucial. Les points peuvent aussi tirer générant un inconfort supplémentaire.  Il faut éviter de sécher la cicatrice au sèche cheveu comme on le suggère parfois : risque de brûlure, endroit naturellement humide... L'urine étant acide, vous pouvez verser de l'eau sur votre cicatrice pendant que vous urinez : cela évitera toute sensation de brûlure.

     

     

    L'épisiotomie à l'étranger

     

    - Au Royaume Uni, le taux d'épisiotomie est passé de 62% en 1986 à 13% en 2001

    - En Suède :  le taux d'épisiotomie est de 6%

    - Aux USA, le taux d'épisiotomie est passé de 70% en 1983 à 19% en 2000

     

     

    A domicile

     

    Une étude de 1998 menée sur 1068 femmes ayant accouché à domicile révèle que :

    - 69.6% des femmes avaient un périnée intact,

    - 1.4% ont eu une épisiotomie,

    - 28.9% avaient une déchirure du premier ou deuxième degré,

    - 0.7% des déchirures du troisième ou quatrième degré.

    Source : http://accoucherautrement.free.fr/Episiotomie.htm


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  • Commentaires

    1
    babyboop
    Jeudi 9 Avril 2009 à 21:24
    en tout cas quant à moi je peux dire que j'ai eu les 2 : episiotomie pour sésé et dechrirure pour nana
    et j'ai infiniment plus souffert avec l'episio que la dechirure !! je ne pouvais pas m'asseoir, quasiment pas marcher...
    avec la dechirure aucun souci de ce genre !!
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